Redonner la vue à ceux qui l’ont perdue
Redonner la vue à ceux qui l’ont perdue
Le Dr Serge Picaud travaille au développement d’une rétine artificielle
dans l’unité Inserm dirigée par José Sahel, à l’hôpital des
Quinze-Vingt, à Paris. Il nous explique les enjeux de son projet.
Quel est l’objectif de votre projet de rétine artificielle ?
C’est de redonner suffisamment de vision aux patients ayant perdu la
vue, comme ceux atteints de rétinopathie pigmentaire ou de
dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA). Car, dans ces maladies,
si les récepteurs à la lumière présents dans la rétine dégénèrent, les
neurones qui transmettent l’information au cerveau sont relativement
préservés. Nous travaillons donc sur une rétine artificielle qui puisse
remplacer les photorécepteurs et transmettre à nouveau une information
visuelle au cerveau via le nerf optique.
Comment fonctionne cette rétine artificielle ?
C’est une « puce » composée de photocapteurs, c’est-à-dire de
composants électroniques qui transforment une stimulation lumineuse en
courant électrique. Ce signal électrique est ensuite transmis, via une
électrode, aux neurones rétiniens, puis au cerveau pour former une
image. La vision demande une grande précision : nos collaborateurs
suisses (Pr Safran) ont montré que pour lire un texte, il faut au moins
600 pixels répartis sur une matrice de 2 mm x 3 mm.
Une
telle miniaturisation est possible, mais c’est l’interface entre cette
rétine artificielle et le vivant qui est délicate : il faut transmettre
l’information de chaque capteur à la fois en termes d’intensité, mais
aussi de situation spatiale, pour former une image fidèle à l’objet qui
est regardé. Idéalement, il faudrait réussir à connecter chaque capteur
avec un ou quelques-uns des neurones rétiniens.
Où en est le développement ?
Nous avons d’abord évalué l’impact du geste chirurgical et la tolérance
de l’implant chez des rats aveugles. Les prochaines étapes sont des
tests d’efficacité chez cet animal, mais aussi chez des porcs, afin de
disposer d’un modèle plus proche de l’homme. Cela nous permettra
d’avoir une première appréciation in vivo de la qualité de l’image
obtenue. Enfin, nous travaillons sur un projet européen pour trouver
les matériaux les plus adaptés à une interface implant/vivant optimale.
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