SUPER TEMOIGNAGE A LIRE
Fibromyalgie : « Cachez ce syndrome que nous ne saurions voir »
de Jean Dornac
2 juillet 2007
J’ai entendu parler de ce « syndrome » pour la première fois à la fin
de l’automne 2005. Une amie d’Internet en était victime depuis
plusieurs années et ce qu’elle me disait était effrayant... J’étais
loin de me douter, alors, que quelques mois plus tard, je ferais
connaissance, à mon tour, dans mon corps, de ce syndrome...
Avant d’aller plus loin, je voudrais tout de même annoncer une
formidable nouvelle : Michel Berthelot, ayant appris mon état, m’a
proposé de m’aider à nouveau sur altermonde. J’en suis particulièrement
heureux parce que je n’ai jamais changé d’avis sur l’homme, sur ses
qualités, notamment de cœur, sur son don d’écriture. Par sa proposition
désintéressée, il montre la grandeur de son être. Il me permet aussi
d’être rassuré quant à l’avenir d’Altermonde, puisque, certains jours,
j’ai beaucoup de peine à travailler. Merci Michel !
La fibromyalgie, cette chose dont il ne faut pas prononcer le nom en France...
Si je tiens à parler de ce mal qui me frappe, ce n’est certainement
pas pour qu’on me plaigne. La raison est plus simple que cela. Parce
qu’une grande partie, trop grande encore, du corps médical refuse de
reconnaître la réalité de ce mal, c’est le malade qui en paie les
conséquences, et parfois gravement. Par ailleurs, je n’ai nulle raison
d’avoir honte ou de cacher mon état. Étant, modestement, un personnage
public au travers du site, j’estime devoir la vérité à celles et ceux
qui me font confiance.
Ce mal est très curieux. En France, comme trop souvent, les
autorités médicales et politiques, ne veulent pas reconnaître la
réalité, celle que les malades connaissent. Il est vrai que ce mal a
ceci de particulier qu’il ne peut pas être détecté. On ne trouve rien
d’anormal dans les analyses de sang, ni avec les radios, scanner ou
IRM.
Quels sont les symptômes classiques ?
L’apparition et le nombre de symptômes sont variables selon les
personnes atteintes. Mais il y a quelques généralités qui se retrouvent
chez pratiquement tous les malades :
* D’intenses fatigues, souvent accompagnées d’essoufflements pour le moindre effort ;
* Des douleurs musculaires et parfois articulaires. Tout se passe
comme si nous avions des tendinites un peu partout. Ces maux peuvent se
retrouver, tantôt dans tous les muscles, tantôt uniquement aux bras ou
aux jambes. On dirait que c’est un mal qui « voyage » selon son humeur
du jour.
* Un affaiblissement progressif de tous les muscles qui, dans les cas
les plus sévères, peuvent nous empêcher de tenir un simple récepteur
téléphonique...
* Des difficultés à marcher. Ainsi, pour ma part, depuis quelques
jours, je marche avec une canne. Elle ne m’est pas nécessaire pour
marcher, mais compte tenu de l’affaiblissement des jambes, je
commençais à ressembler, lorsque je marchais, à un ivrogne... il n’y
avait plus d’équilibre...
* Autres symptômes assez largement partagés par les malades : Une
extrême sensibilité au froid. Impossible de rester dans une pièce
climatisée sans se prendre une nouvelle crise. Or, il faut savoir qu’à
chaque nouvelle crise, le mal s’approfondit... Nous sommes également
très sensibles au vent comme à l’humidité, éléments qui déclenchent les
douleurs musculaires. De même, les grandes chaleurs ne sont pas plus
supportables et provoquent, elles aussi, des douleurs...
* Peu à peu, nous rencontrons de plus en plus de difficultés pour nous
concentrer, donc réfléchir, écrire... De même, la mémoire s’affaiblit,
peu à peu...
La souffrance due à l’ignorance...
Si vous commencez à ressentir certains de ces symptômes anormaux
mieux vaut que votre médecin ne soit pas ignorant de la chose ni trop
rigide dans sa pensée. Les malades atteints par la fibromyalgie, dans
une grande proportion, se trouvent devant un mur. Ils sont trop
nombreux ceux à qui leur généraliste a diagnostiqué une dépression, ne
croyant pas en l’existence de la fibromyalgie. Pour ma part, parce que
j’avais été opéré du cœur il y a six ans, un spécialiste voulait à tout
prix que je sois victime d’une endocardite... Il a persisté même après
que les résultats des analyses fort nombreuses montraient que mon cœur
et ma valve étaient intacts... Mon ancien généraliste, à Lyon, n’a pu
s’empêcher de sourire lorsque je lui ai parlé de fibromyalgie...
J’étais pourtant certain de souffrir de cette maladie, les symptômes
étant totalement semblables à ceux que connaissait mon amie d’Internet.
J’ai eu la chance de rencontrer un généraliste d’exception, ici, dans
ma nouvelle région. Grâce à lui, le diagnostique est fait et je peux
commencer un traitement.
Le malade a donc deux barrières à franchir avant d’avoir une chance qu’on reconnaisse ce dont il souffre.
* Le scepticisme de trop de médecins qui se débarrassent du problème en le classant dans les dépressions nerveuses ;
* La longueur des analyses et contrôles divers puisqu’il faut
éliminer toutes les autres causes possibles avant d’être certain qu’il
s’agisse d’une fibromyalgie.
Malheureusement, même lorsqu’on a la chance de tomber sur un
médecin qui connaît la fibromyalgie, il faut beaucoup de temps avant
d’arriver au diagnostique certain.
Or, le mal, lui, progresse...
À Lyon, on a voulu me faire croire que je souffrais de dépression.
Or, j’avais un moral de fer, juste après la conférence que j’avais pu
donner au Festival Camino de la non-violence... Et puis, au travers de
tout ce que m’avait expliqué mon amie, je savais de quoi je souffrais,
il y avait, de ce point de vue, un côté rassurant. Mais, en revanche,
pour ceux qui n’ont pas la chance de savoir de quoi ils souffrent, et
surtout si leur médecin est ignorant de ce mal, la dépression peut, en
effet, venir assez rapidement. Mais elle ne précède pas le mal, elle en
est une des conséquences possibles, ce qui est très différent. Ce qui
est terrible, c’est que certains malades sont soignés pour une
dépression alors qu’ils n’en font pas. Or, les psychotropes ne sont pas
innocents et peuvent provoquer bien des dégâts...
Un autre problème non négligeable, c’est l’attitude des proches.
Parce qu’aucun organe n’est touché, parce qu’aucune analyse n’est
concluante, et parce qu’hormis le fait d’être très fatigué et souvent,
de ne plus arriver à marcher droit, les proches peinent à croire que
nous sommes malades. Et pourtant, s’ils savaient !...
Que faire si l’on est touché par ce mal, et qu’il est reconnu ?
Il faut savoir que cette maladie n’est pas mortelle. C’est déjà
rassurant en soi. Par contre, à partir d’un certain niveau, elle
devient très handicapante. L’affaiblissement musculaire, sans même
parler des douleurs, nous rend incapable de faire un quelconque travail
physique. Et puis, peu à peu, le travail intellectuel se complique, lui
aussi, puisque la mémoire est touchée mais surtout que la concentration
intellectuelle devient plus ardue. Combien de fois, ces dernières
semaines, je me trouvais devant mes courriers mail, à devoir répondre,
mais à me trouver dans l’impossibilité de le faire ? C’est comme un
blocage très surprenant et un peu angoissant...
En vingt ans d’écriture, je n’ai jamais connu l’angoisse de la page
blanche. Mais je commence à connaître ce genre de panne parce que si
les idées sont toujours présentes, les écrire devient plus dur... C’est
la raison pour laquelle, sans doute, vous me lirez moins dans les
prochains temps... Ceci n’est pas grave, mais cela vous explique ce que
produit, entre autres, la fibromyalgie.
Mais ceci explique aussi, qu’à partir d’un certain niveau
fibromyalgique, il devient impossible de travailler. Là, c’est une
autre galère qui atteint le malade. Il lui faut faire le parcours de la
Cotorep, pour obtenir une carte d’handicapé et ensuite, il lui faut
demander l’invalidité à la Sécurité Sociale. Si la Cotorep semble
reconnaître la fibromyalgie, c’est bien plus dur avec la Sécurité
sociale. Il faut souvent se battre pour l’obtenir, y compris avec des
recours...
À noter, néanmoins, que nous ne sommes pas tous atteints avec la
même gravité. Certains pourront sans doute continuer à travailler, du
moins s’ils peuvent obtenir le traitement médical approprié.
Et à ce propos, il faut savoir aussi qu’actuellement, il n’existe pas de traitement curatif.
Autrement dit, on ne peut pas guérir, aujourd’hui, de la
fibromyalgie. Cependant, le traitement proposé, un antidépresseur
léger, dont la propriété dans le cas de la fibromyalgie est de calmer
essentiellement les douleurs, est efficace sur ce point précis dans 75%
des cas. J’ai remarqué, chez moi, depuis que je bénéficie du
médicament, une amélioration sur la douleur, mais pas sur la fatigue.
De plus, l’affaiblissement musculaire, se poursuit toujours. Ce n’est
pas anormal, d’après des amis atteints du même mal, il faut environ six
mois pour que le traitement redonne un certain confort de vie...
Quelles sont les causes de ce « syndrome » ?
Actuellement, on n’a aucune idée précise sur ces causes. Je n’ai
même pas l’impression qu’une recherche sérieuse soit entreprise, ici,
en France. Si je me trompe, je serais très heureux qu’on me montre le
contraire. En revanche, aux USA, au Canada et en Suisse, la maladie est
reconnue et des recherches sont en cours à ce que j’ai entendu dire.
Il y aurait plusieurs pistes. D’abord, c’est une maladie
neurologique qui semble attaquer le système nerveux central et
notamment les neurotransmetteurs. Elle serait à ranger dans les mêmes
catégories qu’Alzheimer, Parkinson, ou la sclérose en plaques. En
revanche, elle provoque moins de dégâts irréversibles que ces
maladies-là et ne serait pas mortelle.
De l’avis des chercheurs étrangers, la cause pourrait être :
* Un virus
* Un choc psychique
* La pollution alimentaire et atmosphérique
J’aurais pour ma part tendance à privilégier cette dernière piste.
En France, notamment, nous sommes envahis de produits chimiques de
toutes sortes. Je viens de lire, tout à l’heure, qu’Airparif signale
que plus de trente sortes de différents pesticides, herbicides et
fongicides empoisonnent l’air de Paris ! Il serait temps qu’on se
préoccupe de cet empoissonnent légal des populations au nom du profit
et des affaires des multinationales de l’empoisonnement alimentaire.
Si, effectivement, la fibromyalgie est le résultat d’un
empoisonnement alimentaire ou un empoisonnement dû à la pollution de
l’air, voire des deux à la fois, nous ne pouvons pas nous étonner de
l’immobilisme français pour reconnaître et lutter contre cette maladie.
La France est l’un des plus grands producteurs et utilisateurs de
pesticides et d’herbicides. Les autorités veulent protéger cette
industrie très rentable, y compris en sacrifiant une partie toujours
grandissante de sa population ; elles veulent aussi conserver et
développer la société de consommation qui implique, entre autres, les
dérives chimiques. Diverses études ont déjà montré que la recrudescence
des cancers, ces dernières années, était bien dû à ces mêmes
pollutions. Que font les autorités ? Rien, hormis des discours
lénifiants destinés à endormir la population.
Mon but principal en vous parlant de mon expérience de la
fibromyalgie est de vous la faire connaître, et par votre
intermédiaire, de la faire connaître à vos proches et connaissances.
Connaître cette maladie, c’est déjà lutter contre elle en ne laissant
pas s’installer la panique ou la dépression nerveuse si l’on est touché
par elle. J’espère, par ce texte, aider, un peu au moins, celles et
ceux qui sont déjà malades comme celles et ceux qui feront sa
connaissance dans les temps à venir.
Garder un bon moral est déjà une première victoire !
Jean Dornac, écrivain et militant altermondialiste
source : Altermondelevillage