Comme les psychostimulants et la cocaïne, on sait que la nicotine provoque une augmentation de la dopamine en stimulant les récepteurs dopaminergiques, surtout les récepteurs D3, suggèrent des travaux majoritairement précliniques. Bien qu’ayant fait l’objet de nombreuses études, le rôle de ce neurotransmetteur dans le renforcement du comportement tabagique reste débattu. À ce jour, aucune équipe n’avait encore cherché à savoir si la consommation de tabac augmente le taux de dopamine au niveau des récepteurs D3. Un manque que vient palier une étude d’imagerie fonctionnelle (tomographie à émission de positons TEP) réalisée chez 10 fumeurs quotidiens, âgés de 19 à 45 ans et en bonne santé.
Pour être sélectionnés, les sujets devaient fumer 10 cigarettes par jour ou plus (cigarettes « allégées » en nicotine exclues) depuis au moins deux ans et avoir un score de Fagerström égal ou supérieur à 4. Les auteurs ont caractérisé la topographie du tabagisme (nombre, volume, durée moyenne et intervalle des bouffées) et mesuré les marqueurs biologiques (nicotine, cotinine) des participants. Ceux-ci devaient arrêter de fumer et de boire de l’alcool dans les 12 et 24 heures précédant la TEP respectivement. Leur abstinence a été vérifiée par mesure du monoxyde de carbone (CO) dans l’air expiré pour le tabac et éthylotest électronique pour l’alcool.
Les résultats de l’étude confortent l’hypothèse des auteurs selon laquelle le tabagisme augmente la libération de dopamine au niveau des régions cérébrales riches en récepteurs D3, à savoir le système limbique. C’est la première fois qu’un tel phénomène est démontré chez l’homme, et ce grâce aux propriétés du radiotraceur utilisé, expliquent-ils. Cette étude confirme également l’existence d’une relation significative entre l’envie impérieuse de fumer et l’élévation de la dopamine dans la même zone anatomique. Contrairement à des travaux antérieurs, elle met en évidence une corrélation forte entre la diminution de l’anxiété et la libération de dopamine non seulement dans le striatum limbique et dans le pallidum ventral, une région contenant des récepteurs D3, mais aussi D2.
Ces résultats permettent de penser que le blocage de la transmission dopaminergique au niveau des récepteurs D3 peut avoir des effets thérapeutiques dans la dépendance à la nicotine. Pour les auteurs, le traceur qu’ils ont utilisé serait un outil utile pour l’évaluation de nouvelles stratégies thérapeutiques fondées sur la modulation de la libération de la dopamine induite par le tabagisme.
Dr Catherine Faber