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MON COMBAT CONTRE LA FYBROMYALGIE
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15 janvier 2014

Les signes précoces d’autisme

Les signes précoces d’autisme

 

 

A.WINTGENS, 

Centre de référence pour les Troubles du spectre autistique, Service de Psychiatrie infanto-juvénile, Clin. Univ. St-Luc, UCL, Bruxelles

Repérer les jeunes enfants à risque de développer un trouble autistique est essentiel pour permettre la mise en place au plus tôt d’une prise en charge adéquate. Le rôle du pédiatre est fondamental dans ce repérage des signes touchant principalement la sphère de la communication et des interactions sociales du jeune enfant.

Introduction

L’autisme est considéré comme un trouble envahissant du développement (TED), qui affecte le développement de l’enfant, a des conséquences importantes sur la vie quotidienne et engendre des remaniements de la dynamique familiale. L’image de l’enfant sans langage, dans son coin, jouant avec ses mains de manière répétitive, reste une image encore trop souvent représentative de l’autisme. Or, depuis quelques an- nées, la notion de spectre autistique s’est développée, incluant des enfants avec autisme sévère et déficit cognitif important et des enfants avec autisme de forme légère et de bonnes capacités cognitives, montrant ainsi la grande hétérogénéité des  tableaux cliniques.

Le diagnostic d’autisme comprend un trouble de la communication, un trouble des interactions sociales, ainsi que des intérêts et comportements particuliers.

La prévalence du diagnostic de spectre autistique est actuellement de 1 enfant sur 150 (1), avec une fréquence plus élevée chez les garçons (sex-ratio de 4/1). Le diagnostic d’autisme est avant tout un diagnostic clinique s’appuyant sur l’observation de l’enfant et la présence de certains comportements. Ce diagnostic nécessite une approche multidisciplinaire spécialisée et se fait aux alentours de l’âge de 3 ans. Toutefois, un ensemble de signes peuvent être présents bien avant cet âge. Le rôle du pédiatre est fondamental dans le dépistage des signes précoces altérant le développe- ment de l’enfant et dans l’écoute des inquiétudes des parents quant à l’évolution de leur enfant.

Certains parents se sont souvent interrogés très tôt quant au développement de leur enfant et ont été inquiets sans toujours pouvoir identifier les signes de leur inquiétude: un bébé avec le regard ailleurs, très calme, qui ne réclamait jamais… Pour d’autres parents, il s’agit encore d’un parcours du combattant entre leurs premiers signes d’inquiétude et la reconnaissance d’un trouble autistique chez leur enfant. Ces parents ont bénéficié d’une réassurance bienveillante qui ne les a pas totale- ment apaisés et ont dès lors cherché d’autres avis. Pour d’autres parents, les enfants ont connu un développement non inquiétant jusqu’à l’âge de 18 mois, moment où ils ont perçu une régression dans le langage ou dans le développement de l’enfant. En effet, selon les études, chez 20 à 50% des enfants avec autisme, les parents ont décrit des signes de régression dans le développement du langage et dans les interactions socio-émotionnelles durant la deuxième année de vie, le plus souvent aux alentours de 18 mois (2).

Quels sont les signes qui doivent attirer toute notre attention ?

Tout d’abord, il est nécessaire d’avoir une bonne connaissance du développe- ment du jeune enfant pour pouvoir mettre en évidence les signes atypiques de son évolution. Nous vous livrons ici quelques repères cliniques qui doivent bien entendu être considérés dans le contexte global du développement de l’enfant et de son environnement.

Le rapport de l’INSERM (2003) met en évidence comme signes d’alerte absolue des troubles envahissants du développement :

• l’absence de babillage à 12 mois;
• l’absence de gestes (pointage, au  revoir de la main…) à 12 mois;
• l’absence de mots à 16 mois;
• l’absence de combinaisons de deux mots spontanées (pas seulement écholaliques) à 24 mois;
• n’importe quelle perte de compétence (de langage ou sociale) à tout âge.

Dans leur article consacré aux recommandations pour la pratique clinique, A. Baghdadli et al. (3) mettent en exergue la présence de certains signes avant l’âge de 2 ans: passivité, pauvreté de réactivité et de l’anticipation sociale, difficulté dans l’accrochage visuel et l’attention conjointe, retard de langage, absence de pointage, de désignation d’objet et de jeu (social, imitatif, fonctionnel ou de «faire semblant»).

Notre pratique clinique nous permet de confirmer ces observations, soit par leur présence chez les jeunes enfants qui ont présenté un diagnostic d’autisme par la suite, soit chez des enfants plus âgés lors de la description par les parents de leurs antécédents.

Au niveau de la communication, on peut voir apparaître un retard dans le développement du langage non compensé par des gestes. Le jeune enfant peut parfois répéter des sons ou des mots par écholalies. Il ne pointe pas pour réaliser ses demandes. Il peut utiliser la main de l’adulte pour ses besoins comme un prolongement de lui-même et souvent sans regard adressé. Le contact oculaire est en effet souvent absent ou fluctuant.

Parmi les troubles des interactions sociales précoces, on peut repérer une absence de réciprocité sociale lors du partage d’un objet, une absence d’attention conjointe et de pointage (lors de la présentation d’un livre d’images par exemple). L’enfant est décrit comme calme, trop calme, passif malgré les stimulations des parents ou de la fratrie. Il ne tendra pas les bras pour être porté, n’appellera pas lorsqu’il est éveillé le matin. Le jeune enfant ne réagira pas à l’appel de son prénom et se montrera indifférent aux voix familières.

En ce qui concerne les intérêts et comportements particuliers, le jeune enfant peut montrer un vif intérêt pour des activités sensorielles ou sensori-motrices. Il garde pendant longtemps une exploration des objets en les portant à la bouche. Il peut agiter des objets devant ses yeux. Il a tendance à utiliser les jouets proposés de manière particulière, en explorant certains aspects. Il peut s’attacher à certains objets plus inhabituels. Il peut être pris dans des activités répétitives de jeter les objets proposés. Il peut se montrer absorbé par la rotation d’un ventilateur ou d’une machine à laver. Un peu plus grand, il peut passer son temps à allumer et éteindre les lumières… Ses activités et ses jeux sont souvent très répétitifs comme jeter, aligner des objets… L’enfant ne développe pas à cet âge des jeux de «faire-semblant» comme jouer à la dînette, répondre au téléphone… Il peut présenter certaines stéréotypies comme des mouvements de flapping, des rotations sur lui-même, des mouvements de balancement. Il peut montrer une sensibilité excessive à certains bruits.

Le sommeil et l’alimentation peuvent également être perturbés, avec la présence de troubles de l’endormissement ou d’insomnies ainsi que le développe ment d’une sélectivité alimentaire.

Comme le souligne Baghdadli (3), une attention toute particulière devra être retenue face au développement des jeunes enfants dans les fratries où un enfant présente déjà un trouble autistique ou TED, en raison du risque plus élevé de récurrence de TED et du risque de survenue d’autres troubles du développement.

Utilisation d’instruments de dépistage

Baron-Cohen et al. (4, 5) ont identifié à l’âge de 18 mois les domaines du développement qui apparaissent particulière ment prédictifs d’un trouble lorsqu’ils sont absents: le pointing proto-déclaratif, l’attention conjointe, les jeux de faire semblant, l’imitation, le jeu social et l’intérêt social. Ces auteurs ont construit et validé une échelle, le CHAT (Check-list for Autistic Toddlers). Il s’agit de questions posées aux parents et d’items résultant de l’observation de l’enfant par des professionnels. Cet instrument s’est révélé avoir une très bonne spécificité, mais une faible sensibilité. Cet outil a ensuite été modifié en un questionnaire pour les parents: the Modified Checklist for Au tism in Todlers (M-CHAT) (6). L’équipe de Dereu et al. (7) a développé un instru ment adressé aux enfants de 3 mois à 3 ans intitulé Cheklist for Early Signs of Developmental Disorders (CESDD). Il s’agit de cibler les enfants à haut risque qui ont besoin d’une évaluation développementale plus approfondie.

Diagnostics différentiels

Les premiers diagnostics différentiels à exclure sont les troubles sensoriels tels que la surdité ou les troubles de la  vision. Un examen ORL s’impose face à tout retard ou absence de langage. Un retard global de développement peut s’accompagner de certains signes autistiques, mais dans ces cas, l’enfant pré sente en principe plus de capacités de communication et d’interactions sociales. Un retard de langage ou un trouble spécifique de langage ne pourront se confirmer qu’après une prise en charge et en fonction de l’évolution de l’enfant. Une carence affective ou un manque de stimulation pourront égale ment être à l’origine de signes autistiques qui s’estomperont lorsque l’enfant bénéficiera d’une stimulation plus adéquate.

Intérêt d’un dépistage précoce

Dépister les signes d’autisme permet de mettre en place une prise en charge précoce, dans l’espoir de contribuer à une évolution plus favorable de l’enfant. Cette prise en charge permet de cerner les difficultés de l’enfant, de diminuer les problèmes de comportement conséquents au trouble, de donner des moyens de communication à l’enfant, d’accompagner les parents face à un jeune enfant qui ne les regarde pas, ne leur sourit pas… Ce dépistage permet souvent aux parents une meilleure compréhension du comportement de leur enfant et des attitudes plus adaptées à sa problématique.

Quelle conduite à tenir ?

Face à la suspicion d’un trouble autistique chez un jeune enfant, il est important de mettre en place une prise en charge, donc de pouvoir en parler ouvertement avec les deux parents. Pour certains parents qui se questionnent sur l’étrangeté des comportements de leur enfant, la suspicion d’un diagnostic d’autisme peut apparaître comme un soulagement et une meilleure compréhension de leur enfant. Ils sont dès lors prêts à mettre des traitements en place. Pour d’autres, qui ne semblent guère s’inquiéter de certains comportements
de leur enfant, comme l’absence de pointage, l’absence de langage… le pédiatre aura à cheminer avec eux et oser partager ses questions et ses inquiétudes sur les particularités de leur jeune enfant. Il s’agit de parler d’enfants à risque en soulignant qu’un diagnostic définitif ne pourra être établi avant l’âge de 3 ans.

Il est important d’entourer les parents de professionnels spécialisés dans la petite enfance et les troubles autistiques, de préférence à proximité de leur domicile. Les jeunes enfants peuvent dès lors être orientés vers des équipes à même de faire une évaluation multidisciplinaire spécifique, qui permettra de faire certains diagnostics différentiels. Depuis 2005, les centres de référence pour les troubles du spectre autistique réalisent des bilans multidisciplinaires spécifiques, incluant une évaluation pédopsychiatrique avec entretiens semi-directifs avec les parents, une évaluation développementale, une observation avec des outils standardisés spécifiques aux troubles autistiques, une évaluation logopédique incluant la communication et le langage, une évaluation psychomotrice et sensorielle, de même qu’une évaluation neuro-pédiatrique avec examen clinique de l’enfant. Le bilan comprend bien souvent la réalisation d’investigations complémentaires. L’enfant présentant un trouble du développement et suspect d’un trouble autistique devra être réévalué après l’âge de 3 ans et après un temps de prise en charge  pour peaufiner le diagnostic, confirmer ou infirmer le trouble autistique.

Nous proposerons dans un premier temps une prise en charge en psychomotricité relationnelle ou une thérapie du développement. Pour stimuler la communication et le langage, une prise en charge logopédique développant des moyens de communication alternatifs peut se mettre en place relativement tôt. Les différents Services d’Aide précoce peuvent apporter à l’enfant et ses parents des aides spécifiques à domicile ou dans les lieux de vie de l’enfant (crèche, enseignement maternel…). D’autre part, un travail thérapeutique parents-enfant, sous forme de guidance parentale, est souvent nécessaire pour accompagner les parents dans leurs difficultés au quotidien et leur permettre une réflexion quant à leur vécu et au lien avec leur jeune enfant.

Conclusion

S’il nous paraît essentiel de tenir compte des signes précoces et de mettre en place une prise en charge thérapeutique avant l’âge de 3 ans, la fiabilité du diagnostic reste incertaine avant cet âge. Certains diagnostics différentiels, dont les troubles spécifiques du langage, le manque de stimulation… sont à faire en fonction de l’évolution de l’enfant. Pour le pédiatre, il s’agira d’oser partager ses inquiétudes avec les parents tout en tenant compte de l’impact de la suspicion d’un tel diagnostic sur la relation précoce et le lien entre les parents et leur enfant. Accompagner les parents dans ce chemine ment, les orienter vers des spécialistes de leur entourage permettra qu’une aide spécifique puisse être apportée au plus tôt à l’enfant et à sa famille.

Références

1. Fombonne E. Epidemiology of Pervasive Devlopmental Disorders. Pediatric Research 2009;65(6):591-8.
2. Zwaigenbaum L, Bryson S, Lord C. Clinical Assessement and Management of Todlers With Suspected Autism Spectrum Disorder: Insights From Studies of High-Risk Infants. Pediatrics 2009;123:1383-92.
3. Baghdadli A, Beuzon S, Bursztejn C. Recommandations pour la pratique clinique du dépistage te du diagnostic de l’autisme et des troubles envahissants du développement. Archives de Pédiatrie 2006;13:373-8.
4. Baron-Cohen S, Allen J, Gillberg C. Can autism be detected at 18 months? The needle, the haystack, and the CHAT. British Journal of Psychiatry 1992;161:839 43.
5. Baron-Cohen S, Cox A, Baird G, et al. Psychological markers in the detection of autism in infancy in a large population. British Journal of Psychiatry 1996;168:158 63.
6. Robins DL, Fein D, Barton ML, Green JA. The Modified Checklist for Autism in Todlers: An initial study investigating the early detection of autism and pervasive developmental disorders. Journal of Autism and Developmental Disorders 2001;31:131-44.
7. Dereu M, Warreyn P, Raymaekers R, et al. Screening for Autism Spectrum Disorders in Flemish Day-Care Centres with the Checklist for Early Signs of Developmental Disorders. Journal of Autism and Developmental Disorders 2010;40:1247-58.

 

 

 

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http://www.jim.fr/medecin/actualites/index.phtml

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