une ARS condamnée à placer une handicapée
Une ARS condamnée
A placer une handicapée
Paris, le mardi 8 octobre 2013 - Marie-Claire et Jacques Loquet avaient assigné vendredi dernier en référé le conseil général du Val-d'Oise et l'Agence régionale de santé (ARS) d'Ile-de-France devant le tribunal administratif. Sur le fondement d’une « atteinte au droit à la vie » ils exigeaient que soit placé en institution leur fille Amélie âgé de 19 ans et atteinte d’une syndrome de Prader-Willi.
Leur enfant avait eu accès à des établissements spécialisés jusqu’à sa majorité. Elle avait alors était contrainte de retourner vivre chez ses parents.
Ces derniers demandaient depuis un an un placement dans un centre spécialisé. Ils ont finalement obtenu gain de cause hier devant le Tribunal administratif de Pontoise, qui dans son ordonnance datée du 7 octobre « enjoint au directeur général de l’Agence régionale de santé d’Ile-de-France de prendre toutes dispositions pour qu’une offre de soins permettant la prise en charge effective, dans un délai de quinze jours, de la jeune femme, par un établissement médico-social adapté à son état, soit présentée à ses parents ». Cette injonction est assortie «d’une astreinte financière de 200 euros par jour de retard ».
Cette décision pourrait « faire jurisprudence » selon l’UNAPEI (Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis) : « l’injonction que prononce le tribunal dans cette affaire nous donne un espoir pour Amélie mais aussi pour l’ensemble des personnes concernées (…). Nous souhaitons que toutes les familles qui attendent puissent trouver une place, au besoin en saisissant la justice », a expliqué, Thierry Nouvel le directeur général de l’association à l’AFP.
Il y avait en tout cas urgence pour les parents d’Amélie et la procédure en référé n’était pas de trop. Les parents d’Amélie, interrogés par le journal Le Monde ont ainsi expliqué : « le cimetière est en face et vivre comme on vit, ça ne vaut pas le coup ». Et il est vrai que les troubles dont souffre Amélie sont particulièrement envahissant et difficilement gérable dans un cadre familial : « sa pathologie la pousse à avaler n'importe quoi, même l'herbe du jardin, même les produits d'entretien. Elle retourne toute la maison, casse tout pour trouver de la nourriture », explique sa mère au journaliste du quotidien, avant d’ajouter « qu'est-ce qu'ils attendent de familles comme la nôtre, les pouvoirs publics ? Qu'on se mette tous une balle dans la tête ? Ce n'est quand même pas normal qu'on laisse les gens dans la mouise comme ça ! On est dans quel pays ? ».
Pour les associations, même si cet arrêt ne faisait pas jurisprudence, il signe une nouvelle étape dans la lente amélioration de la prise en charge par les pouvoirs publics des personnes souffrant de handicap et de leur famille.
« C'est une décision importante qui place l'Etat devant ses responsabilités et qui répond bien à la situation d'urgence des personnes handicapées », a ainsi commenté ce lundi auprès de l'AFP Patrice Tripoteau, directeur général adjoint de l'Association des Paralysés de France. Tandis que Christel Prado, la présidente de l'UNAPEI rappelle que jusqu’ici : «les lois censées garantir l'accueil des personnes handicapées dans des établissements adaptés ne sont pas appliquées».
Dans un communiqué, l’ARS a tenu réagir à ce jugement en se défaussant quelque peu ! « L’ARS souhaite rappeler que dans le cadre de ses prérogatives, en l’état du droit, elle ne dispose pas du pouvoir d’imposer l’admission d’une personne dans une structure médico-sociale. Si l’ARS est bien responsable de l’organisation globale de l’offre de prise en charge régionale, l’orientation individuelle des personnes handicapées relève de la compétence de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH). »
L’ARS s’emploie aussi à se féliciter du travail accompli : « depuis plusieurs années l’ARS a développé des moyens très importants pour améliorer la prise en charge des personnes handicapées en région Ile-de-France ».
Avant d’assurer (a-t-elle vraiment le choix ?) qu’elle prendra les décisions qui s’imposent : « pour faire suite à la décision du tribunal administratif, l’ARS, en lien avec la MDPH, prendra contact sans délai avec les établissements identifiés et la famille pour tenter de trouver une solution de prise en charge adaptée. »
Rappelons qu’au delà du cas d’Amélie, sans doute plus d'une dizaine de milliers d'enfants et d'adultes cherchent actuellement une place en hébergement spécialisé en France.
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