Les dates d'expiration des médicaments

Les dates d'expiration

Des médicaments sont-elles

« Abusivement courtes » ?

Une étude publiée dans les Archives of Internal Medicine suggère de s’interroger sur les pratiques actuelles de l’industrie pharmaceutique en matière de détermination des dates d'expiration des médicaments.

Lee Cantrell et ses collègues de l'université de San Diego en Californie ont analysé des médicaments dont la date limite avait expiré depuis 28 à 40 ans. Les huit produits en question avaient été retrouvés par hasard chez un pharmacien américain. Les chercheurs ont été étonnés de constater que la majorité des principes actifs de ces médicaments supposés périmés depuis longtemps étaient toujours présents en quantité acceptable.

Sur les 15 principes actifs différents que renfermaient les produits au moment de leur commercialisation, 12 molécules testées se sont avérées en quantité supérieure ou égale à 90 % de la dose initiale. Il s'agissait notamment de la codéine, du phénobarbital, du paracétamol, du méprobamate... Étonnamment, trois de ces molécules ont même été trouvées en quantité supérieure à 110 % du dosage initial, ce qui laisse entrevoir certains dysfonctionnements dans les pratiques passées de fabrication des médicaments.
Les chercheurs relèvent deux exceptions notables : contrairement aux autres principes actifs, l'aspirine et une amphétamine se sont fortement dégradées au fil du temps.

Même si la stabilité des médicaments testés n’est pas totale et parfaite après une très longue période d’expiration, les chercheurs estiment que leurs résultats « sont en faveur de l'efficacité d'une large extension de la date limite pour de nombreux médicaments ». Ils rappellent au passage qu’un programme militaire américain, le Shelf-Life Extension Programme (SLEP), permet d’ores et déjà d’utiliser des médicaments périmés après vérification de leur efficacité, et ce afin de faire faire des économies au service de santé des armées. « Compte tenu du fait que les Américains dépensent actuellement plus de 300 milliards de dollars annuellement en médicaments de prescription, repousser la date d'expiration des médicaments pourrait générer des économies énormes pour le budget de la santé », indique Lee Cantrell.

L'an passé, en Suisse, l'Association des médecins du canton de Genève, avait également dénoncé la durée de vie « abusivement courte » des médicaments. Elle avait alors interpellé le Conseil fédéral sur le fait que Genève venait de détruire un stock de 900 boîtes de Tamiflu arrivant à expiration (pour un coût supérieur à 22 000 euros), alors que les cantons de Vaud et Fribourg continuaient de les utiliser, suite à l’obtention de deux ans supplémentaires de leur durée de validité de la part du laboratoire Roche. Des experts suisses étaient montés au créneau pour rappeler que les dates d’expiration ne correspondent pas à la période pendant laquelle le médicament est pleinement actif, mais à la durée pendant laquelle le fabricant garantit son action. Or, cette durée est basée sur des tests effectués deux à cinq ans après la fabrication. Pour Maury Pasquier, femme politique membre du Parti socialiste suisse, « rien ne dit que la durée d'action d'un médicament ne pourrait pas être plus longue, mais simplement on arrête de l'attester ». Et l’élue de s’appuyer sur une étude conduite par la Food and Drug Administration montrant qu'un grand nombre de médicaments conservés dans des conditions correctes conservent 90 % de leur efficacité pendant au moins cinq ans après leur date d'expiration. Ces résultats varient en fonction du type de stockage (les médicaments craignent l’humidité) et de la forme galénique des produits (les solides étant plus stables que les liquides).

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