La sexualité des handicapés mentaux
Jean-Camille est un Malgache d’une trentaine d’années arrivé en
France en 1999. Une déficience mentale légère qui l’empêche de
s’exprimer en français sans le soutien d’un interprète et surtout,
d’avoir pu devenir arbitre de football, son rêve. Le club dont il
faisait partie, au sein du Grand Troyes, lui confiait néanmoins
l’arbitrage des matches entre les joueurs les plus jeunes.
En 2004, il en avait été exclu suite aux doléances de Coralie*, une
adolescente de 11 ans, appuyée à la rambarde à regarder un match, qui
avait soudain senti une main sur ses fesses. Elle l’avait reconnu et
dénoncé à la police. Interrogé, Jean-Camille avait admis le geste mais
fait valoir que Coralie et son frère l’avaient « embêté ».
Le parquet avait classé l’affaire et Jean-Camille s’était intégré dans un autre club de football.
De stade en stade
Mais en décembre 2008, une plainte est déposée par les parents de
Marion*, une enfant de 7 ans. Lors d’un match, Jean-Camille a été
surpris par un dirigeant dans la tribune, en train d’imposer des
attouchements sexuels à la fillette. Il s’est interposé puis a alerté le
père de Marion. Le prévenu a été placé en détention provisoire. Il y
est resté sept mois.
Car, entre 2004 et 2008, il avait été condamné pour s’être masturbé
dans un bus devant des jeunes et avait été incriminé pour une affaire
d’agression sexuelle à Montereau dans laquelle les experts ont conclu à
une abolition du discernement.
« Je ne me souviens plus de rien », répète hier à la barre Jean-Camille
qui, aux abois, choisit une ligne de défense que déplorent les
avocates des parties civiles, et dont le représentant du ministère
public souligne qu’elle « ne plaide pas en sa faveur ».
« L’attardé mental »
Selon les experts, qui ont conclu à une « responsabilité altérée », le
prévenu présente « une grande immaturité affective et sexuelle ».
Dénué de perversité, il serait attiré par les fillettes en raison de sa
déficience mentale et de son repli sur lui-même. « Depuis, il ne sort
plus qu’avec moi », a insisté sa mère, précisant que son fils est
désormais suivi aux plans médical et psychologique.
Les avocates des parties civiles, Mes Massard et Malausséna, ont
dénoncé des « gestes intolérables car avilissants » ainsi qu’un «
profil inquiétant ».
« Il s’est exprimé plus clairement pendant la procédure. Malgré ses
difficultés de raisonnement, il a conscience que ses agissements sont
répréhensibles », a commenté Vincent Jacquey, représentant du ministère
public, avant de requérir quinze mois de prison dont trois ferme. « Il
faut dire ce qu’il en était : dans le club, c’était l’attardé mental »,
a exposé en défense Me Delaune, s’étonnant que le parquet ressorte «
une affaire dont le classement, en 2004, avait été motivé par la
non-intentionnalité du geste sexuel ». « Il n’assume pas son assurance
physique et son âge civil mais il a fait des progrès considérables
depuis que sa mère a organisé le suivi et depuis sa remise en liberté
sous contrôle judiciaire, personne n’a à se plaindre de lui », a-t-elle
plaidé.
Déclaré coupable, Jean-Camille a été condamné à huit ans de suivi sociojudiciaire. Il lui est notamment interdit de fréquenter les mineurs ainsi que tous les lieux qui les accueillent. À défaut, il encourt deux ans de prison.
*Les prénoms ont été modifiés pour protéger l’anonymat des victimes mineures.
Auteur : Compte rendu d’audience Valérie ALANIÈCE
Article paru le : 12 janvier 2011 sur : http://www.lest-eclair.fr/index.php/cms/13/article/501305/Fillettes_agressees____un_handicape_a_l_epreuve