Les infections nosocomiales (1/2)
CHIRURGIE ORTHOPÉDIQUE ET RÉPARATION Un
cas de responsabilité médicale exposé lors d'une expertise concernant
un patient ayant eu des séquelles à la suite d'une intervention en
chirurgie orthopédique effectuée dans un établissement privé
Les infections nosocomiales peuvent être répertoriées selon leurs
mécanismes d'apparition, selon les agents infectieux (bactéries, virus,
champignons, voire parasites) « responsables », ou par spécialité, le
plus souvent lorsque des gestes dits invasifs sont effectués
(orthopédie, urologie, cardiologie, etc.), mais aussi lorsque les
circonstances sont favorisantes (immunodépression, accouchement, etc.)
Si les infections nosocomiales peuvent être définies ou leur survenue
détaillée, il reste des zones d'ombre : le domaine de l'infectiologie
dans lequel elles s'inscrivent ne peut être exhaustif quant aux agents
en cause, en raison de l'émergence ou de la découverte de nouveaux
germes et de la mise à jour de mécanismes biologiques et
épidémiologiques ignorés jusqu'alors.
Elles font partie des
complications des actes médicaux. Jusqu'à présent, si dans certains
domaines leur taux a pu être abaissé à un niveau presque nul, elles
gardent, dans d'autres situations, une incidence non négligeable. Les
infections nosocomiales ont été souvent appréciées en fonction de
facteurs de risque plus ou moins bien identifiés qui ne sont cependant
pas toujours quantifiables. Au-delà de leur survenue par des fautes
d'asepsie, le plus souvent, les facteurs de risque sont liés, bien sur,
au type de geste pratiqué, aux circonstances (cadre de l'urgence) et
aux conditions dans lesquelles elles sont effectuées (les conditions
sont importantes : elles comprennent les mesures d'asepsie du personnel
médical et paramédical, l'asepsie du patient, le matériel utilisé et
les locaux où sont pratiqués les soins). Elles sont également liées à
des facteurs risque, plus moins intriqués, propres au patient :
antécédents d'infections avant l'acte les ayant déclenchées, terrain
favorisant comme l'immunodépression, dont l'origine peut être multiple
(iatrogène, Sida, diabète, maladies du système immunitaire,
toxicomanies, maladies des glandes notamment des surrénales,
insuffisances des grandes fonctions : respiratoire, cardiaque, rénale
ou hépatique), ou d'autres pathologies antérieures à l'acte.
Les
infections nosocomiales sont traitées et soignées. Cependant, à
l'instar de n'importe quelle pathologie d'origine organique ou
traumatique, elles peuvent générer des séquelles. Jusqu'à présent, ces
séquelles ont été prises en charge par les organismes de sécurité
sociale pour une partie seulement des préjudices occasionnés.
En
cas d'infection nosocomiale, les demandes de réparation, quand elles
ont été faites devant les tribunaux, ont le plus souvent consacrées la
présomption de la faute médicale et ont permis une indemnisation plus
entière des préjudices. C'est alors, le plus souvent, les médecins
ou/et les établissements de soins et leurs assurances qui ont eu charge
d'assurer la réparation du dommage. Une jurisprudence s'est dégagée de
ces décisions.
La loi du 4 mars 2002 a voulu entériner cette
jurisprudence, en proposant des procédures de règlement avant de
recourir aux tribunaux par l'intermédiaire de commissions régionales
(CRCI). A noter que ces commissions peuvent être sollicitées dans
d'autres cas que l'infection nosocomiale. Les règlements se font par
les assurances (la loi faisant obligation aux médecins et aux
établissements de soins de s'assurer) jusqu'à un certain seuil à partir
duquel l'indemnisation du patient victime d'infection nosocomiale
relève de la solidarité nationale et se fait par un organisme
administratif sous tutelle du ministère de la santé (ONIAM) financé par
la sécurité sociale.
La mise en jeu de ces commissions n'est pas
systématique, les victimes de risques sanitaires peuvent saisir les
tribunaux pour demander réparation si elles estiment que la
responsabilité civile des médecins est engagée (tribunal de grande
instance le plus souvent au vue des sommes escomptées).
Dans le
cadre de la responsabilité médicale, c'est le manquement du médecin à
ses obligations qui définie la faute. La faute va être la cause du
dommage. Cependant ce lien de causalité n'est pas toujours évident. La
faute médicale est parfois difficile à prouver pour le patient victime.
La jurisprudence, puis la loi du 4 mars 2002, pour aboutir à
l'indemnisation, détermine en cas de responsabilité médicale la notion
de présomption de faute et son corollaire, la notion de perte de chance.
D'où l'importance de l'expertise médicale permettant outre l'évaluation
du dommage, une caractérisation de la faute médicale le cas échéant.
Cependant il faut préciser que la loi du 4 mars a voulu aller au-delà
de la faute médicale et propose d'indemniser les victimes de risques
sanitaires au sens large…
Après un bref rappel sur les infections
nosocomiales et les moyens pour les combattre, l'expertise autour
duquel s'articule ce mémoire sera retranscrite et commentée brièvement,
avec un rappel sur l'appréciation médico-légale du risque nosocomial.
LES INFECTIONS NOSOCOMIALES Les infections nosocomiales sont des maladies infectieuses contractées à l'hôpital. Les délais communément admis sont variables et dépendent du contexte. L'infection nosocomiale survient dans un délai au-delà de 48 heures après l'admission et de 48 heures après la sortie du patient. Cependant si l'infection survient dans les quarante-huit premières heures et est en rapport avec un geste invasif ; elle est considérée comme nosocomiale. Sont également considérées comme nosocomiales les infections survenant dans les trente jours suivant une intervention chirurgicale ; ce délai est étendu à un an en cas de pose de matériel prothétique. Ces délais sont indicatifs. Origines. Les réservoirs des
micro-organismes à l'origine des infections sont multiples. Ils peuvent
être classés en deux catégories : environnementaux et humains. C'est
l'hôpital qui constitue le réservoir environnemental : l'eau utilisée,
le matériel, l'alimentation, le linge, l'air, les bâtiments, etc. Formes cliniques. Tous les
organes du corps humain peuvent être le site d'infections nosocomiales.
Ne seront évoquées ici, que les types d'infections les plus répandues
dans ces cas. Moyens de lutte. Le code de la
santé publique n'est pas très précis quant aux normes à respecter. Ces
normes sont en perpétuelle évolution. En cas de manquement aux règles
de bonne conduite, les juges s'appuient davantage sur le code de la
déontologie comme norme de droit applicable (Art. 32 du code de la
déontologie : « le médecin s'engage à assurer personnellement au
patient des soins consciencieux, dévoués et fondés sur les données
acquises de la science, en faisant appel s'il y a lieu à des tiers
compétents. », Art. 40 : « le médecin doit s'interdire…de faire courir
au patient un risque injustifié. »), sur des circulaires qui émanent le
plus souvent du ministère de la santé (circulaire du 20 octobre 1997,
quant à l'obligation de résultat dans l'obtention et le maintien de
l'état stérile des dispositifs médicaux), des organismes
institutionnels (direction générale de la santé, ANDEM, ANAES) et sur
des consensus entre professionnels exposés au travers d'expertises de
médecins. Prévalence. Pour la plupart des
travaux, le pourcentage d'atteintes est variable : 5 à 10 % des
patients hospitalisés contractent une infection nosocomiale. Une étude,
réalisée en 1993 dans une partie des hôpitaux de l'assistance publique,
a retenu le chiffre de 9,9 %. Le nombre d'infections est plus élevé ;
un même patient peut avoir plusieurs infections nosocomiales. La
proportion pour cent infections nosocomiales fait apparaître une
prépondérance des infections urinaires, suivies par les infections
broncho-pulmonaires et les infections sur site opératoires, les plus
graves. |
Source : Pierre Flori